lundi 3 décembre 2007

Leçon de démocratie à la Chávez (1)

On l’avait affublé de tous les qualificatifs, populiste, dictateur, autoritaire, castro-communiste ; pour les entreprises de communication les autorités vénézuéliennes ne constituaient pas un gouvernement mais un "régime". Depuis huit ans, l’opposition mettait constamment en doute la qualité démocratique du vote électronique vénézuélien (un des systèmes les plus avancés, si pas le plus avancé au monde). On a même pu voir ces derniers mois des milliers d’étudiants manifester, les mains peintes en blanc, la bouche bâillonnée hurlant "l’agonie de la démocratie". Et pourtant.

Et pourtant en ce dimanche 2 décembre, le président Hugo Chávez vient de donner au monde entier et à l’opposition locale une véritable leçon de démocratie. Vers 1h30 du matin, il s’est adressé au pays, à ses partisans mais aussi à ses opposants. "Vous voyez ? Vous vous rendez compte que c’est possible, que c’est le chemin à suivre ? J’espère qu’à partir de maintenant vous oublierez le chemin de la violence et de la déstabilisation de nos institutions" a-t-il dit à ces derniers.

Hugo Chávez venait de reconnaître le rejet de sa proposition de réforme constitutionnelle par la moitié des vénézuéliens. "Nous reconnaissons la décision qu’a pris le peuple. Je tiens ma parole, nous respectons les règles du jeu. Ce n’est pas la première fois, rappelez-vous que nous l’avions également fait lors du référendum révocatoire (1)".

"J’avais un dilemme mais j’en suis sorti, je suis tranquille. Comme j’espère que tous les vénézuéliens seront tranquilles, chacun avec sa position en respectant l’autre. Chaque journée électorale permet à notre pays de mûrir" ajoutait Chávez.
Le dilemme avoué du Comandante était de savoir si les résultats extrêmement serrés qui donnaient un léger avantage au "non", étaient réversibles avec les dernières urnes à dépouiller. "Le dilemme avec lequel je me débattais était de savoir si la tendance allait arriver au point de devenir irréversible ou pas".

"Le Venezuela ne mérite pas de vivre une situation aussi tendue que celle-ci. J’avais cette immense préoccupation de me voir dans la même situation qu’un autre président, aux Etats-Unis, qui a du attendre les résultats des votes venant de bases militaires au Japon. Je ne voulais pas d’une victoire à la Pyrus, mon éthique ne me l’aurait pas permis" expliquait-il.

"Je vous demande à tous de rentrer chez vous. Que ceux qui ont gagné célèbrent la victoire. Mais un conseil, sachez administrer votre victoire, mesurez bien mathématiquement votre victoire".

Et mathétiquement il s’en est fallu de très peu. Après la fermeture des bureaux de vote, certains médias internationaux (2) annonçaient une possible victoire du "oui". Mais plus les heures passaient, plus les visages devenaient tendus dans le camp chaviste et plus les représentants de l’opposition et les médias privés affichaient un optimisme qui laissait présager une victoire du "non".

La réforme se présentait en deux blocs, le bloc "A" reprenait les 33 articles présentés par le Président et le "B" les 36 modifiés par l’Assemblée nationale. C’est finalement par un pourcentage de 50,70 % que le bloc "A" a été rejeté (49,29 % de "oui") et par 51,05 %que le "B" l’a également été (48,94% de "oui"). Le taux de participation a aussi reflété le rejet d’une partie des supporters du président, qui ont préférés ne pas faire le déplacement pour voter.


"Nous n’avons pas réussi, pour l’instant. Mûrissons politiquement et confrontons les processus avec une conviction démocratique qu’ici c’est la démocratie, il n’y a pas de dictature. Je comprends et j’accepte que ma proposition de réforme constitutionnelle est une proposition profonde, intégrale, une équation de pouvoir".

Il fit aussi référence à la campagne médiatique abominable, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, qui s’est abattue sur cette réforme. "Ce peuple a été soumis à un feu nourri d’artillerie de mensonges, de peurs. Mais malgré tous ces subterfuges, que 4 millions de personnes aient voté pour le projet socialiste, c’est un grand saut politique. Nous continuerons à construire le socialisme dans le cadre que nous permet cette Constitution".

En reconnaissant les résultats (ce dont seules l’opposition et les multinationales de la communication doutaient) et en appelant à la confrontation sur le terrain des idées, le président Chávez a montré une fois de plus son talent démocratique au monde entier. A lui et à la base populaire maintenant de faire en sorte que cet échec se transforme en victoire, en victoire morale comme il l’a appelé à le faire, mais surtout en remise en cause des difficultés et des faiblesses qui apparaissent dans la construction du socialisme du XXI ème siècle. Le processus de transformation sociale ne pourra que sortir renforcé de cette confrontations d’idées...

Notes:


(1) En 2004, à la moitié du premier mandat de Chávez, l’opposition avait réussi à rassembler suffisamment de signatures pour convoquer un référendum révocatoire prévu dans la Constitution.

(2) La loi électorale vénézuélienne interdit les médias locaux de diffuser des estimations de résultats avant le premier bulletin officiel du Conseil National Electoral (CNE).

2 commentaires:

vlg a dit…

«On l’avait affublé de tous les qualificatifs, populiste, dictateur, autoritaire, castro-communiste»

Malheureusement cela ne s'arrêtra pas là.

Anonyme a dit…

castro-communiste pour moi c'est pas une insulte! ils sont cons les escualidos



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