mardi 24 mars 2009

Le Venezuela trace la voie d'une réponse progressiste à la crise

Le président vénézuélien Hugo Chávez a présenté ce samedi 21 mars une série de mesures économiques face à la crise mondiale. Alors que les gouvernements néolibéraux entendent faire payer la débâcle capitaliste aux travailleurs, Caracas ouvre la voie d'une réponse progressiste. Il s'agit, entre autres, de débloquer 100 milliards de dollars d'investissements publics sur les quatre prochaines années, d'augmenter de 20% le salaire minimum en 2009 et de limiter les revenus des hauts fonctionnaires.

Ces 100 milliards de dollars d'investissements publics se traduiront, entre autres, par la construction d'infrastructures et de nouveaux logements. (Photo: Seb)

L'annonce était attendue par beaucoup, y compris par l'opposition qui espérait des mesures impopulaires comme l'augmentation du prix de l'essence ou une dévaluation du Bolivar (la monnaie locale). Rien de tout cela ne figurera finalement à l'agenda. (1)

A contre-courant des recommandations classiques du FMI ou de la Banque mondiale, Caracas a présenté ce samedi un plan d'investissements publics à hauteur de 100 milliards de dollars (2) sur les quatre prochaines années. "Le gouvernement révolutionnaire va investir une masse globale de 100 milliards de dollars. Et cela n'inclut pas les investissements pétroliers qui eux atteindront 125 milliards. C'est une des plus fortes mesures anticycliques et anticrise", a expliqué le président Chávez.

Par ailleurs, le budget 2009 de l'Etat sera revu à la baisse (- 6,7%) et recalculé sur un prix du baril de pétrole à 40 dollars, au lieu des 60 dollars comme base actuelle. Afin de faire face à cette réduction, l'Etat doublera pratiquement son endettement interne et fera des économies sur les salaires des haut fonctionnaires.

Selon les chiffres présentés par le président Chávez en Conseil des ministres, la dette externe du Venezuela représentait 64,1% du Produit intérieur brut (PIB) il y a 20 ans et se situe aujourd'hui à 9,3% (fin 2008). La dette interne se situe quant à elle à 4,3% du PIB. "Ce pourcentage peu élevé nous permet aujourd'hui de prendre des mesures d'augmentation (de la dette interne), calculées de façon exacte afin de nous protéger et de nous renforcer", a-t-il expliqué.

Par ailleurs, le mandataire a appelé l'Assemblée nationale (le Parlement) à légiférer afin de limiter les salaires des hauts fonctionnaires. En ce qui concerne l'Excécutif, un décret devrait être publié dans les prochains jours afin de réviser et réduire les revenus les plus élevés. Les dépenses somptueuses sont également concernées. "Nous allons éliminer les frais des véhicules de luxe, les cadeaux, la construction de nouveaux sièges, les missions à l'étranger, la publicité superflue, etc.".

Hausse du salaire minimum

Parmi les mesures figure également une augmentation du salaire minimum de 20% en deux étapes: 10% à partir du premier mai et 10% en septembre prochain. Celui-ci passera donc, cette année, de l'équivalent de 274 euros à 331 euros par mois, se maintenant parmi les plus élevés d'Amérique latine.

La seule décision qui sera directement répercutée sur le portefeuille de la population, afin d'équilibrer en partie le budget de l'Etat, est l'augmentation de 3% de la TVA. Elle passe ainsi de 9 à 12%, loin derrière les 16% de la fin des années 90. "De la même manière que nous avions réduit la TVA de 14 à 9% lorsque nous jouissions des hauts revenus pétroliers, maintenant nous effectuons une augmentation prudente", a fait remarquer Chávez.

Finalement, le gouvernement a confirmé la nationalisation (annoncée il y a déjà plusieurs mois) de la banque filiale du groupe espagnol Santander, Banco de Venezuela. Si cette décision se concrétise, l'Etat vénézuélien contrôlera 25% du secteur bancaire et en sera l'acteur le plus important. Ces actions, accompagnées de la ferme volonté de maintenir les dépenses sociales en matières d'éducation, de santé et d'infrastructures, démontrent qu'il n'y a pas de fatalité face à la crise capitaliste et qu'un gouvernement souverain, non soumis aux diktats des institutions financières internationales et des entreprises, peut agir en fonction des intérêts des travailleurs... lorsque l'intention y est.

Notes:

(1) La chaîne privée Globovision était même allée jusqu'à inventer l'annonce imminente d'une diminution de la quantité de devises étrangères octroyées à chaque Vénézuélien. L'information, qui s'est révélée totalement fausse, fut relayée par plusieurs médias d'opposition avant d'être démentie par un communiqué du ministère de l'Economie et des Finances.

(2) Le 23 mars, un dollar était égal à 0,73 euro.


Article publié sur le site de La Gauche le 23 mars 2009

lundi 16 mars 2009

L'industrie alimentaire dans la tourmente

Ces dernières semaines le gouvernement vénézuélien a pris le contrôle de la totalité des entreprises productrices de riz dans le pays, et ce pour une période annoncée de 90 jours. Le secteur privé est accusé de ne pas respecter la régulation des prix appliquée à cet ingrédient classique du menu quotidien de la population. Le président Hugo Chávez a par ailleurs ordonné l'expropriation d'une usine de la multinationale Cargill.

La mesure est motivée par le fait que le secteur privé tente de contourner le contrôle des prix en produisant majoritairement des variétés de riz "à saveurs", qui peuvent être vendues jusqu'à trois fois le tarif fixé par l'Etat. La fédération patronale se scandalise et insiste sur le fait que les entreprises "ne peuvent pas vendre à perte", de son côté le gouvernement invoque la "sécurité alimentaire".

"Ils achètent le riz aux producteurs et ils refusent de le produire au prix régulé; c'est pourquoi j'ai ordonné l'intervention de ce secteur de l'agro-industrie", déclarait fin février Hugo Chávez, qui a aussitôt ordonné à la Garde nationale et à l'armée d'appuyer "la prise et l'intervention de toutes les entreprises qui produisent du riz au Venezuela" (58 usines au total).

Le mercredi 4 mars, un autre pas a été franchi avec la décision d'exproprier l'une des usines de la multinationale Cargill, située dans l'état occidental de Portuguesa. Selon les autorités, cette entreprise ne produisait "pas un seul kilo" de riz de base, mais consacrait la totalité de sa production (2400 tonnes par mois) à des variétés de riz non soumises au contrôle de prix.

"Commencez le processus d'expropriation de Cargill, avec en plus une enquête judiciaire car ce qu'ils font est une violation flagrante (de la loi)", a annoncé le mandataire vénézuélien lors d'une réunion du Conseil des ministres. La législation sur la souveraineté et sécurité alimentaire reconnaît en effet les aliments comme un bien d'utilité publique. Elle permet l'expropriation par décret présidentiel des entreprises ne respectant pas ce cadre légal et ce "contre paiement à un juste prix".

Selon les autorités, cette production ciblée de variétés non régulées pourrait provoquer une déficience dans l'approvisionnement des aliments de base. Dans la pratique, on peine à trouver le paquet de riz conventionnel dans les rayons des supermarchés. Plusieurs produits sont d'ailleurs concernés et les entreprises du secteur agroalimentaire doivent désormais respecter des quotas de production de denrées aux prix régulés.

A titre d'exemple, les usines de sucre, de café ou encore de fromage, doivent destiner 95% de leur production à la version régulée du produit. Les 5% restants pouvant être destinés à des variantes au tarif libre. En ce qui concerne le riz, la quantité régulée doit correspondre à 80% de la production.

Le président Chávez a averti que la prise de contrôle des usines, prévue normalement pour une période de 90 jours, pourrait mener à d'autres expropriations si les entreprises ne collaboraient pas à l'approvisionnement du pays. Pour sa part, le président de la fédération patronale (Fedecámaras), José Manuel González, s'est dit prêt à dialoguer avec le gouvernement "à condition que le Président s'écarte de son projet politique" qui prône l'instauration du "socialisme du XXIème siècle".

Sur le "Simón Bolívar"...

Le "Simón Bolívar" est un voilier trois mats de la Marine vénézuélienne. Construit en 1980 en Espagne, il mesure près de 80 mètres de long.

Fin février, environ 70 cadets s’y sont embarqués pour un voyage de formation de quatre mois vers le Brésil, l’Uruguay et l’Argentine.


La voix du sud
a eu l’opportunité d’y embarquer et de partager durant quelques heures la vie de l’équipage, entre les ports vénézuéliens de Puerto Cabello et La Guaira.

Le reste en images... (Photos: Seb)


Creative Commons License

Les visuels et textes publiés sur ce blog sont sous
licence creative commons

Si vous souhaitez utiliser l'un de ces éléments, merci de me contacter