mercredi 13 février 2008

Le Venezuela dans la ligne de mire de Washington

Le 16 janvier dernier, je titrais ironiquement une des notes de ce blog "En 2008, les astres contre le Venezuela". J’avais alors été interpellé par le degrés de politisation des prédictions d’une pseudo voyante dans une revue féminine. Evidemment, il ne fallait pas être devin pour savoir que les agressions contre le Venezuela allaient se poursuivre cette année et que mère nature n’en serait pas la principale responsable. On vient à peine de tourner la première page du calendrier et voilà en effet que les voyants du Pentagone se mettent déjà au travail.

Le 5 février dernier, le directeur d’Intelligence nationale des Etats-Unis, Mike McConnel, remettait son rapport au Sénat en compagnie du directeur de la CIA, Michael Hayden. Il ressort de ce document qu’après Al-Qaida, le Venezuela figure au rang des principales "préoccupations" des services de renseignements nord-américains.

Selon l’analyse présentée par Mr. McConnel, "inspirés et appuyés par le Venezuela et Cuba, les leaders de la Bolivie, du Nicaragua et dans une moindre mesure de l’Equateur, mettent au point des agendas qui cherchent à prolonger les mandats présidentiels, affaiblissent les médias et les libertés civiles".

D’après le site en espagnol de la BBC "le rapport de 45 pages qui place le réseau Al-Qaida comme la principale menace pour les Etats-Unis, inclus une évaluation détaillée de l’Amérique Latine avec le Venezuela comme le plus grand sujet de préoccupation" (1).

Hugo Ben Chávez ?

Le rapport signale que le président Chávez "continuera d'essayer d’unir l’Amérique Latine sous sa propre son influence, avec un agenda radical de gauche, anti-étasunien et à contempler Cuba comme un allié idéologique clé".

Eh bien oui, effectivement, sur ce coup-là les voyants de la CIA ne se trompent pas: le président Chávez et le Venezuela continueront en effet d’essayer d’unifier l’Amérique Latine.

Les Etats-Unis ont toutes les raisons de s’inquiéter. Il faut bien avouer que le président vénézuélien est le promoteur, sur le continent latino-américain, de concepts terroristes tels que l’indépendance énergétique, la souveraineté alimentaire, la solidarité, la coopération et pire, la paix en Colombie !

Parce que voilà, le rapport parle aussi du trafic de drogue. Les services de renseignements nord-américains accusent en effet le président Chávez de "manque de coopération dans la lutte contre le trafic de drogue" et fait le lien entre le Venezuela et le trafic de cocaïne vers les Etats-Unis. Accusations qui avaient d’ailleurs déjà été émise le mois dernier par le directeur du Bureau de Politique nationale de Contrôle sur les Drogues (Office of National Drug Control Policy), John Walters, depuis Bogotá.

Ce "manque de coopération dans la lutte contre le trafic de drogue" fait référence au refus du Venezuela de se plier aux politiques interventionnistes de l’Agence étasunienne antidrogue, la DEA (Drug Enforcement Administration).

Par contre, et c’est un comble, le rapport remarque les efforts du gouvernement colombien d’Alvaro Uribe dans ce domaine et qualifie les résultats d’ "impressionnants" !

C’est le monde à l’envers ! La Colombie n’est ni plus ni moins que le premier producteur mondial de cocaïne… et les Etats-Unis le premier consommateur.

Mais il y a pire, les personnes les plus proches du président colombien sont mouillées jusqu’au coup dans les démêlés avec la justice pour avoir des liens flagrants avec les paramilitaires et le trafic de drogue.

Pas plus tard que la semaine dernière, le jugement de Jorge Noguera, ex directeur des services secrets colombiens (DAS, Departamento Administrativo de Seguridad) et bras droit d’Alvaro Uribe, a été relancé par les tribunaux pour des affaires relationnant Noguera (aujourd’hui derrière les bareaux) aux paramilitaires et au narcotrafic.

Et le propre cousin d’Alvaro Uribe, l’ex sénateur Mario Uribe, est lui-même soupçonné de trafic de stupéfiants.

ExxonMobil mène la danse

Quelques jours à peine après la parution du rapport des services d’intelligence US, la multinationale pétrolière ExxonMobil a menacé l’entreprise publique vénézuélienne Petróleos de Venezuela S.A. (PDVSA) de congeler les actifs de cette dernière à l’étranger pour 12 milliards de dollars.

Décision que Exxon prétend faire appliquer par des tribunaux hollandais, anglais et étasuniens. PDVSA a évidemment réagit et rejeté cette menace.

Le dimanche 10 février, le président Chávez a menacé qu’en cas de gel des actifs de PDVSA à l’étranger, il suspendrait les exportations de pétrole vers les Etats-Unis.

Ce mardi, PDVSA a annoncé dans un communiqué qu’elle suspendait ses relations commerciales et la fourniture de pétrole à la multinationale ExxonMobil.

Exxon, avec ConocoPhillips, sont les deux seules compagnies qui ont refusé les termes des nouveaux contrats proposés par PDVSA en mars dernier et entrés en application le premier mai.

C’est à cette date qu’à été officialisée la nationalisation des gigantesques réserves de la Frange pétrolière de l’Orénoque. Les nouveaux contrats (acceptés par les autres multinationales qui opèrent au Venezuela comme Total, Statoil, Chevron, BP, etc.) imposent une participation minimale de PDVSA de 60 %.

L’attaque d’ExxonMobil contre le Venezuela ne surprend absolument pas et n’est que le reflet du combat qui doit être mené et radicalisé, celui du droit de chaque pays à administrer ses ressources naturelles à sa guise et pour son propre développement.

Note:

(1) BBC Mundo, EE.UU. advierte sobre Chávez



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