mercredi 18 février 2009

Chávez renoue avec la victoire

Le président Chávez lors du discours de fin de campagne,
sur l'avenue Bolivar, à Caracas. (Photo: Seb)

Après la défaite de décembre 2007 et le succès en demi-teinte de novembre 2008, le président vénézuélien, Hugo Chávez, a renoué avec la victoire ce dimanche 15 février. Avec une différence de près de dix points, les électeurs ont approuvé l'élimination de la limite de mandats pour le président, les maires, gouverneurs et députés.


"Nous avons ouvert de part en part les portes du fut
ur!" C'est comme cela que Hugo Chávez s'est adressé dimanche soir à la foule rassemblée face au Palais présidentiel de Miraflores, après la diffusion du premier bulletin du Conseil national électoral (CNE).

Avec le résultat de ce référendum, la limite de deux mandats consécutifs pour toutes les fonctions électives est désormais supprimée. Le leader bolivarien, qui en est à son deuxième mandat, n'a pas tardé à confirmer son intention de se représenter.


"A moins que Dieu n'en dispose autrement, à moins que
le peuple n'en dispose autrement, ce soldat est déjà précandidat à la présidence de la République pour la période 2013-2019", déclarait-il devant ses partisans qui scandaient "victoria popular" (1).

Le CNE a émis son troisième bulletin ce mardi, avec 99,75% des votes comptabilisés, le 'oui' l'emporte avec 54,86% (6 319 636 votes) face au 'non' qui totalise 45,13% (5 198 006), l'abstention se situant à 30,08%.


L'opposition atteint pour la première fois les cinq millions de votes. Le chavisme, quant à lui, perd un million de voix par rapport aux élections présidentielles de 2006 (7 309 080, son plus haut score).


Les partisans du 'non' confirment leur victoire de novembre dernier (2) dans quatre états: Zulia, Táchira, Miranda et Nueva Esparta. Ils ne rééditent pas la victoire acquise dans l'état de Carabobo mais la remplacent par une victoire dans l'état de Mérida. Cette fois, la circonscription du grand Caracas est restée aux mains du chavisme.

Rectifier le tir... enfin?

Dans son discours, le président Chávez n'a pas céd
é au triomphalisme et a appelé à rectifier le tir "dans tous les domaines du gouvernement". Mais il a surtout abordé les thèmes qui lui ont fait perdre des points ces dernières années, fautes de résultats concrets pour la population.

"Je veux compromettre ma parole et celle de tous ceux qui m'accompagnent dans le gouvernement, (...) dans la bataille que nous devons mener avec plus d'intensité, plus d'efforts et surtout plus de résultats contre l'insécurité dans les rues, la lutte contre la corruption, la lutte contre le gaspillage, la lutte contre la bureaucratie, contre l'inefficacité".


On ne pouvait mieux résumer. Car si la majorité des Vénézuéliens a de nouveau soutenu le président (et le processus de changements sociaux qu'il incarne) dans cette épreuve électorale, les critiques ne manquent pas et se font de plus en plus présentes. Dès le lundi, à peine passée la période préélectorale où tout le monde fait bloc et prend son mal en patience, les critiques des auditeurs fusaient sur les ondes de la radio publique, Radio Nacional de Venezuela.


"Il faut faire le ménage dans le PSUV (Parti socialiste uni du Venezuela) de l'Etat du Zulia. Les dirigeants du parti ici ne représentent pas le peuple. Tant qu'on aura des dirigeants comme ça, on n'arrivera jamais à gagner le Zulia", se plaignait une auditrice parmi tant d'autres.

Mais aux abords du Palais de Miraflores le soir de la victoire, Alejandro, jeune travailleur d'une coopérative audiovisuelle, apportait déjà un élément de réponse: "L'efficacité et l'approfondissement de la révolution passent d'abord par une dépersonnalisation du processus".

A l'annonce des résultats, devant le Palais de Miraflores. (Photo: Seb)

Notes:

(1) "Victoire populaire".
(2) Voir sur ce blog: "Elections régionales au Venezuela: la bataille reste à venir".



Article publié sur le site de La Gauche le 18 février 2009

mercredi 11 février 2009

Quand l'opposition fait mentir Bolivar...

Portrait du "Libertador", Simón Bolívar,
dans la salle de presse du Palais présidentiel de Miraflores. (Photo: Seb)


Ce weekend, les Vénézuéliens seront de nouveau appelés aux urnes pour un référendum visant à supprimer la limitation du nombre de mandats des maires, gouverneurs et du Président de la République.

La Constitution actuelle, approuvée par référendum en 1999, permet deux mandants consécutifs à tous ces niveaux de pouvoir. L'amendement proposé par l'Assemblée nationale, s'il est approuvé le 15 février par la majorité de la population, permettra donc de modifier les articles correspondants.

En somme, rien d'exceptionnel, rien de plus que ce qui se fait déjà dans la plupart des pays européens (dans 17 pays sur 27 en ce qui concerne la réélection du chef de l'Etat). A la différence que le Venezuela continuera, quoi qu'il en soit, de jouir d'une Constitution qui permet la réalisation d'un référendum révocatoire à la moitié des mandats, à tous les niveaux de pouvoir.

Rappelons également que, depuis l'arrivée de Hugo Chávez à la présidence, les référendums sont devenus chose courante, alors qu'ils étaient inexistants auparavant dans la politique vénézuélienne (1). Depuis 1999, quatre référendums ont été organisés au niveau national, dont seul celui de 2007 sur la modification de 69 articles de la Constitution a été perdu (2).

Malgré cela l'opposition continue à jouer la carte de la peur du "régime castro-communiste" et de la "dictature". Depuis le début de la campagne, elle utilise une phrase de Simón Bolivar dans sa propagande. Ou plutôt elle utilise une demi phrase car elle n'hésite pas à la censurer pour servir ses intérêts.

"...Rien n'est plus dangereux que de laisser un même individu au pouvoir durant une longue période. Le peuple s'habitue à lui obéir et lui s'habitue à le diriger; de là naît l'usurpation et la tyrannie", peut-on lire sur les tracts distribués par les militants de l'opposition dans toute la capitale.

Ceux-ci ont d'ailleurs même baptisé leur équipe de campagne "Comando Angostura", du nom de la ville (aujourd'hui appelée Ciudad Bolívar) d'où, le 15 février 1819, le Libertador prononçait le discours dans lequel il cite cette phrase.


Et pourtant, les trois petits points qui commencent la citation sont loin d'être anodins, ils substituent la partie où Bolivar dit : "Les élections répétées sont essentielles dans les systèmes populaires" et il continue ensuite "car rien n'est plus dangereux que de laisser un même individu au pouvoir durant une longue période. Le peuple s'habitue à lui obéir et lui s'habitue à le diriger; de là naît l'usurpation et la tyrannie".


La manipulation se passe de commentaire...


Notes:


(1) Jusqu'en 1989, les maires et les gouverneurs des états (l'équivalent des provinces ou départements) n'étaient pas élus au suffrage universel mais désignés par le Président de la République!


(2) Ces quatre référendums sont : 1998, pour l'approbation de la convocation à une assemblée constituante; 1999 pour l'approbation de la nouvelle Constitution; 2004, référendum révocatoire à la moitié du mandat de Hugo Chávez; et enfin 2007, pour l'approbation de la réforme constitutionnelle qui fut rejetée à 51,05%.


Creative Commons License

Les visuels et textes publiés sur ce blog sont sous
licence creative commons

Si vous souhaitez utiliser l'un de ces éléments, merci de me contacter