samedi 5 septembre 2009

Washington amplifie sa présence militaire en Amérique latine


Des militaires vénézuéliens montent la garde le 13 avril 2002.
(Image issue du reportage de Guarataro.films, "Un golpe y una carta")


Face à la montée de l’unité latino-américaine et au développement de blocs régionaux comme le sont l’ALBA (Alternative bolivarienne pour l’Amérique), PetroCaribe (accords pétroliers et sociaux), la Banque du Sud ou encore la Unasur (Union des Nations sudaméricaines) ; les Etats-Unis tentent de reprendre la main dans la région en augmentant drastiquement leur présence militaire.

Le gouvernement d'Alvaro Uribe a annoncé récemment son intention d’autoriser les Etats-Unis à utiliser sept bases militaires en territoire colombien, officiellement pour combattre le trafic de drogue et les groupes insurgés. De cette façon, Washington s’offre en fait une porte d’entrée sur tout le continent et ses ressources naturelles, parmi lesquelles l’Amazonie. La Colombie dispose en effet de cinq frontières (avec le Panama, le Venezuela, le Brésil, le Pérou et l'Equateur) et d’un accès à deux océans (Pacifique et Atlantique par la mer des Caraïbes).

Jusqu’à présent la politique de Washington avait consisté à surarmer la Colombie, son allié stratégique dans la région, et créer ainsi un déséquilibre militaire en faveur de celui-ci face à d’autres pays considérés comme des menaces potentielles. Stratégie bien connue et qui a fait ses preuves au Proche-Orient avec l’Etat d'Israël. Depuis 2000, les Etats-Unis ont apporté plus de 5,5 milliards de dollars à la Colombie à travers le Plan Colombia. Le pays est ainsi devenu le premier récepteur d’aide militaire étasunienne du continent et le troisième du monde.

Alors que les médias accusent fréquemment le Venezuela d’être le responsable d’une course aux armements en Amérique latine (notamment pour ses achats d’armes ou d’avions Sukhoi à la Russie), très peu se donnent la peine d’expliquer ce qui se passe en Colombie et quel budget y est dépensé en armement. Avec l’excuse de la "lutte contre le terrorisme" (dans ce cas-ci les FARC, l’ELN et les groupes paramilitaires d'extrême droite), les forces armées colombiennes sont en fait les mieux équipées du continent.

Alors que le Brésil, le plus grand pays du cône sud, consacre 1,5% de son PIB à la défense, la Colombie en consacre officiellement 3,8%. Et selon le journaliste uruguayen Raúl Zibechi, des études indépendantes estiment que les dépenses militaires de Bogota s’élèvent en réalité à 6,5% du PIB, bien au-dessus des dépenses des Etats-unis eux-mêmes en la matière.

De plus, la Colombie est aussi le pays qui destine la plus importante partie de son budget militaire à l’acquisition d’équipements, 25%. Alors que le Venezuela y destine dix fois moins, 2,3%. La Colombie dispose également de la plus grande armée du continent. Ses troupes sont passées de 86 000 effectifs en 1986 à 120 000 en 1994. Ce chiffre a ensuite doublé en à peine 15 ans avec le lancement du Plan Colombia, atteignant les 217 000 actuellement. Cependant, si on ajoute à cela la totalité des effectifs de défense, de sécurité et de police, on comptabilise 460 000 hommes. Face à cela, le Venezuela voisin ne pèse pas très lourd avec ses 63 000 hommes.

En plus des sept nouvelles bases dont ils disposeront très prochainement en Colombie, les Etats-Unis peuvent également compter sur leurs installations militaires dans les pays suivants : Honduras, El Salvador, Costa Rica, Pérou, Paraguay, ainsi que sur îles de Aruba, Curaçao, Puerto Rico et Cuba (Guantanamo). La fermeture de la base équatorienne de Manta (suite au refus du président Correa d’en renouveler le contrat) est donc plus que largement compensée.

Enfin, il est bon de rappeler qu’en juillet 2008 l’armée américaine avait réactivé sa Quatrième Flotte, chargée de patrouiller les mers du continent latino-américain. Cette flotte n’était plus active depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.



Article à paraître dans le prochain numéro du Drapeau Rouge.



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