dimanche 29 avril 2007

A quand une aube pour l’Europe ?

Désirant m'informer sur ce qu'il se passe en Europe, je lisais récemment les chroniques du chercheur altermondialiste Raoul Marc Jennar. Textes d'une grande utilité si l'on veut comprendre les politiques perverses menées par l'Union européenne et plus particulièrement par la Commission (1). Privatisation de l'eau, destruction des services publics, les "quatre libertés" (liberté de circulation et d’établissement des marchandises, des capitaux, des services et des personnes), etc. Bref, pas de quoi vous donner envie de rentrer sur le Vieux Continent. Surtout lorsque de l'autre côté de l'Atlantique résonne un discours que mes oreilles d'Européen ne sont pas habituées à entendre. On parle en effet de solidarité, de collaboration, de développement de services publics, de coopération en matière d'enseignement, en matière de médecine, etc.

Ce week-end se tient au Venezuela le sommet de l'ALBA (Alternative bolivarienne des Amériques, "alba" signifie aussi "aube"). J'ai donc pensé qu'il pouvait être utile de donner une définition un peu plus précise de ce qu'est cette Alternative, afin de démontrer que les politiques menées par nos dirigeants européens et nationaux ne correspondent non pas à une fatalité mais bien à une réelle volonté d'approfondir toujours plus les réformes néolibérales, aux dépends des acquis sociaux.

J'ai choisi de traduire un article de Miguel Lozano, journaliste de l'agence de presse Prensa Latina, publié cette semaine dans le quotidien économique Reporte (2) dont voici les principaux passages :

Sommet Amérique latine – Caraïbes

Photo : Seb

"A bas le capitalisme", les murs ont des visages à Caracas...

Les leaders du Venezuela, de Cuba, de la Bolivie et du Nicaragua se réunissent ce samedi 28 avril à Barquisimeto (ville de l'Etat de Lara, au Venezuela). Il s'agit d'une réunion dans le cadre de l'ALBA (Alternative bolivarienne des Amériques), qui vise la consolidation et le probable élargissement de cette initiative (3).

La rencontre devra mettre en lumière les perspectives de ce projet qui, dans de nombreux domaines, constitue une initiative aux caractéristiques propres et prétend avoir une portée plus large que les habituels accords économiques et commerciaux.

Dès ses débuts, avec la signature de l'accord originel entre les présidents vénézuélien, Hugo Chávez et cubain, Fidel Castro, le 14 décembre 2004 ; l'orientation s'est focalisée sur la coopération et la complémentarité, avec un important contenu social.

En effet, l'ALBA inclut des accords tels que la construction d'une raffinerie au Nicaragua, avec une capacité de 150 000 barils par jour, ou encore la formation par Cuba et le Venezuela de 200 000 médecins latino-américains en 10 ans, ainsi que des campagnes d'alphabétisation.

Selon Chávez, l'ALBA donne à l'intégration économique une dimension culturelle (une maison d'édition de l'ALBA a déjà été crée), sociale, éducative, scientifique et même sportive. Le tout sous des formes pour l'instant encore en construction au cours ce qui peut être considéré comme la deuxième phase du projet.

Un des aspects significatifs est l'orientation flexible donnée à ce projet qui, rappelons-le, est surgit comme une alternative au projet de Zone de libre Echange pour les Amériques (ZLEA en français, ALCA en espagnol) impulsé par les Etats-Unis dans un cadre clairement néolibéral.

(...)

Un autre élément est la possibilité -également avancée par le président vénézuélien- que sur le chemin de la consolidation de ses mécanismes d'intégration, le projet s'oriente de plus en plus vers les gouvernements régionaux, tels les provinces ou les municipalités.

Dans cette perspective, des organisations sociales, des coopératives ou d'autres instances similaires sur le continent latino-américain pourraient également s'incorporer au projet, par des mécanismes encore à définir.

En février dernier, les premiers ministres de Antigua-et-Barbuda, Dominique et Saint-Vincent-les-Grenadines (…) ont signé une Déclaration politique de soutient à l'ALBA.

Le sommet de Barquisimeto, auquel ont été invités plusieurs pays des Caraïbes, devra éclaircir la portée de cette Déclaration. Le tout sans écarter la possibilité d'inclure d'autres membres. Parmi les déclarations de base de cette initiative, figure la recherche de l'utilisation rationnelle et solidaire des ressources énergétiques des pays latino-américains et des Caraïbes, traditionnellement dominées par des entreprises étrangères.

Mais en termes politiques, l'ALBA se présente comme l'embryon d'une intégration latino-américaine sans précédent, avec une portée difficile à comprendre si l'on se contente d'utiliser les critères traditionnels pour analyser les alliances et les propositions d'intégration.

Bien qu'il reste des aspects à définir par rapport à cette proposition ambitieuse et complexe, sa seule existence dans une région en plein processus de changements mériterait une révision de nombreux concepts acceptés jusqu'à présent comme valides, y compris dans la manière de voir et analyser les alliances.

Prensa Latina - Miguel Lozano

(1) Pour accéder à ces articles, consultez le site de l'Unité de Recherche, de Formation et d'Information sur la Globalisation : www.urfig.org

(2) Miguel Lozano, "Cumbre Latinoamericano-Caribeña", in Reporte, mercredi 25 avril 2007, Caracas

(3) Pour en savoir plus sur l'Alternative bolivarienne des Amériques, consultez le dossier ALBA sur le RISAL

mercredi 25 avril 2007

Le grand saut !

Photo : Seb

Le projet de ce blog me trottait dans la tête depuis quelques temps. Plusieurs personnes me l’avaient même conseillé mais je ne m’étais jamais vraiment décidé à faire le pas, faute de temps principalement. C’est en discutant avec mes connaissances que je me suis rendu compte à quel point le Belge de la rue ignore ce qui se passe ici au Venezuela.

Présent sur place depuis le mois d’octobre, j’ai donc décidé de mettre mes quelques articles en ligne afin qu’ils touchent un maximum de personnes. La majorité des papiers publiés sur ce blog l’ont déjà été soit dans des revues, soit sur d’autres sites. Vous y accéderez en cliquant sur le titre de chacun d’entre eux. La colonne de liens sur votre droite vous y renvoie également.

De la même manière, j’essaierai de renvoyer le lecteur vers d’autres sources d’information qui lui permettront d’approfondir certains sujets, de mieux connaître l’expérience vénézuélienne et plus globalement tout le mouvement populaire qui secoue l’Amérique latine actuellement. Des articles sur d’autres pays latino-américains seront donc aussi mis en ligne.

Vous trouverez ci-dessous des textes datant parfois de plusieurs mois. J’ai pensé qu’il était pertinent de les publier tels quels, afin de permettre au lecteur de se faire une idée de l’évolution de la situation. Cette page a pour but d’informer ceux qui ne savent que peu de choses sur le Venezuela, à partir de mon expérience personnelle. Mis à part les articles je publierai également des photos, tout en essayant de vous faire palper du bout du clavier l’ambiance qui règne ici.

Enfin, ma principale motivation est d’offrir une analyse différente à celle propagée par les médias commerciaux qui pour la plupart diffusent une version tronquée de la réalité locale. Ce blog se veut donc une voix dissonante face au discours médiatique monocorde.

J’attends bien évidemment vos commentaires, remarques, suggestions, collaborations, etc.

Bonne lecture !

Seb

La révolution bolivarienne sur le chemin de l'unification

Article publié dans La Gauche, mai 2007

L'une des grandes tâches actuelles du processus vénézuélien est l'unification des révolutionnaires sous une même bannière. Le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), nom provisoirement donné à la future force politique bolivarienne, suscite actuellement le débat au sein du camp chaviste. L'occasion d'écarter définitivement bureaucrates et opportunistes ?

L'idée mûrissait depuis plusieurs mois déjà, elle est maintenant activée. Dans un premier temps, le "Commandante" avait nommé une "commission promotrice" afin de déterminer la meilleure manière de démarrer la construction du parti uni. A l'heure actuelle, plus de 14 000 jeunes "propulseurs" sillonnent le pays avec la tâche de recenser tout militant désirant s'investir dans cette initiative. Une fois le recensement complété, des délégués seront élus par la base afin de représenter leur circonscription lors du congrès de fondation de l'organisation, prévu dans le courant l’année.

Cependant trois partis membres de la coalition gouvernementale refusent pour l'instant de se dissoudre. Il s'agit de trois des quatre principales forces politiques du pays: Pour une Démocratie Sociale (PODEMOS), Patrie Pour Tous (PPT) et le Parti Communiste du Venezuela (PCV). Les trois formations ont assuré qu’elles continueraient à appuyer le gouvernement tout en se maintenant hors du PSUV.

Mais le discours de plus en plus radical des dirigeants de PODEMOS face à l’initiative de Chávez laisse présager un possible rapprochement de certains d’entre eux avec l’opposition. C’est ce que déclarait récemment Iván Gutiérrez, ex-secrétaire général pour la section de Caracas et qui a quitté PODEMOS avec quelques 300 autres cadres moyens et près de 2 000 militants. "Ils vont se retrouver avec une coquille vide parce que 80 % du parti, dirigeants et militants, vont suivre l’appel du président" ajoutait-il. Le PPT fait également face à des départs mais dans une moindre mesure.

La conscience révolutionnaire

Le PCV appelle quant à lui à la création d’un large front anti-impérialiste. Edgar Lucena, membre du comité central et député à l’Assemblée nationale, affirme que "l’étape actuelle est une étape de libération nationale. Nous devons conquérir notre indépendance totale face à l’impérialisme nord-américain. Tous les acteurs sociaux participeraient à ce large front. Y compris la petite bourgeoisie et les secteurs économiques qui se sentent affectés par la politique hégémonique du gouvernement US et qui, d’une façon ou d’une autre, ont aussi des positions nationalistes. Cette bourgeoisie s’identifierait à ce front anti-impérialiste. Ce qui ne sera pas le cas avec le PSUV." Discours fort peu ambitieux pour un parti qui se prétend l’avant-garde révolutionnaire...

Chávez sait que pour approfondir la révolution il a besoin de cet outil que constituera le parti. Une organisation de base capable d'alimenter le « proceso » en idées et en futurs cadres. Et dont la tâche fondamentale sera de créer une véritable conscience révolutionnaire, avec comme corollaire indispensable d’évincer les opportunistes et bureaucrates. Mais ce n'est pas le seul outil dans la création de cette conscience. La nouvelle force politique se dessine parallèlement au lancement du troisième moteur de la révolution, "Morale et Lumières" (1), qu’il décrit de la façon suivante : "Education morale, économique, politique et sociale. Bien au-delà de l’école, dans les usines, les ateliers, dans les campagnes, etc. Une véritable secousse morale. Nous avons avancé beaucoup mais il nous reste encore énormément de choses à approfondir (…) Nous devons démolir les vieilles valeurs de l’individualisme, du capitalisme, de l’égoïsme et créer de nouvelles valeurs. Cela ne pourra se faire qu’à travers l’éducation." Au nouveau parti d’agir en digne porteur de cette bannière.

(1) Les 5 "moteurs" de la révolution sont : la loi habilitante, la réforme constitutionnelle, morale et lumières, la nouvelle géométrie du pouvoir et l'explosion du pouvoir communal.

Les médias militants de la droite vénézuélienne

Article publié dans La Gauche, mai 2007

"Non à la fermeture de RCTV !" Cette phrase est devenue la litanie de l'opposition antichaviste. Elle a même résonné jusque Bruxelles et Strasbourg. Marcel Granier, le propriétaire de la chaîne privée Radio Caracas Television (RCTV) entend en effet dénoncer cette "censure" devant les institutions européennes. Reporters Sans Frontières est également monté au créneau pour défendre la "liberté d'expression". Et pourtant, il s'agit une fois de plus d'une campagne mensongère visant à discréditer une mesure légitime qui (et il important de le souligner) n'a rien à voir avec une quelquonque fermeture.

Les faits sont clairs : la concession de la fréquence hertzienne accordée par l’Etat vénézuélien à Radio Caracas Télévision pour une durée de 20 ans prend fin le 27 mai, elle ne sera pas renouvelée. La chaîne privée ne pourra donc plus émettre en fréquence VHF (1), mais cela n'implique ni expropriation ni interdiction de fonctionnement. Car si la fréquence appartient bien à l'Etat, les bâtiments, les infrastructures et le matériel appartiennent quant à eux au groupe privé Uno Broadcasting Caracas, actionnaire majoritaire de RCTV. Marcel Granier et ses journalistes pourront donc continuer à s'exprimer librement par le câble ou par satellite.

"S'il s'agissait d'une mesure politique, nous aurions ouvert une procédure administrative et plusieurs chaînes de télévision auraient été fermées dans les jours qui ont suivi le coup d'Etat du 11 avril (2002), puisque nous savons qu’elles y ont participé activement", a précisé le ministre du Pouvoir populaire pour les Télécommunications et l'Informatique, Jesse Chacón. En effet, les médias privés et particulièrement RCTV ont joué un rôle actif lors du coup d'Etat d'avril 2002, incitant à la violence et au renversement du président. Cependant, le gouvernement n'a jamais pris aucune mesure de censure. Et la non rénovation de la concession n'en est pas une. Elle s'inscrit au contraire dans la ligne de la constitution approuvée par référendum en 1999 et qui proclame la démocratisation des médias.

Qu'adviendra-t-il du canal 2 ?

Aujourd'hui, le gouvernement bolivarien a décidé de socialiser le canal 2, fréquence utilisée par RCTV, qui deviendra libre à partir de ce 28 mai. Le débat mené actuellement au sein de la société vénézuélienne est de savoir quel type de télévision remplacera RCTV ? Les propositions avancées jusqu’à maintenant parlent d'une chaîne donnant la priorité et le choix de la programmation aux coopératives et aux producteurs nationaux indépendants. Un média de service public, financé par l'Etat mais non contrôlé par l'Etat. Une fois de plus, les Vénézuéliens cherchent leur propre voix, la voix de toute la communauté, pour que la population crée la télévision dont elle a besoin et non, comme cela a été le cas jusqu'à maintenant, que les médias façonnent la population en fonction de leurs intérêts financiers.

(1) Au Venezuela, selon le ministère des Télécommunications, le secteur privé contrôle 78% des chaînes de télévision VHF et l’État 22%. En UHF, 82% sont privées, 7% publiques et 11% communautaires.

mardi 24 avril 2007

Rencontre entre parlementaires vénézuélien(ne)s et eurodéputée

Le 18 avril dernier, des parlementaires vénézuélien(ne)s membres de la Commission permanente de la famille, la femme et la jeunesse, ainsi que de la Commission des peuples indigènes se sont réuni(e)s avec Eva Britt Svensson, députée suédoise au Parlement européen. Durant la rencontre au Palais national législatif, la députée a exprimé son intérêt envers le processus révolutionnaire vénézuélien et a affirmé se sentir “très solidaire avec le peuple du Venezuela”.

Caracas, 18 avril 2007 (NOTISUR) - “Une des raisons de ma présence est que je m’intéresse fortement à ce qui se passe au Venezuela. Toutes les questions relatives aux femmes attirent mon attention et ici j’ai pu apprendre beaucoup sur les avancées qui ont été faites en matière de droits des femmes” a déclaré Eva Britt Svensson, députée du Groupe de la Gauche unitaire européenne.

“Maintenant je peux retourner au Parlement européen et parler de la situation que vit le Venezuela” a commenté la députée et vice-présidente de la Commission des droits de la femme et de l'égalité des chances. A propos de l’image avec laquelle elle est repartie du pays, Eva Britt Svensson a déclaré: “J’ai rencontré beaucoup de monde, des femmes, des représentants de différentes ethnies, et je sens un espoir très fort en l’avenir. Il est très important de discuter avec les gens en Europe et de leur dire qu’un autre monde est possible et que le Venezuela essaie d’être cet autre monde. Je pense que l’Europe et les autres pays auront beaucoup à apprendre du Venezuela dans le futur.”

Le député de l’Assemblée nationale vénézuélienne, Alberto Castellar, vice-président de la Commission de la famille, la femme et la jeunesse, a qualifié la visite de la représentante européenne de “très positive”. “Nous sommes parvenus à un échange qui va permettre à l’eurodéputée de témoigner en Europe, en Suède et dans d’autres pays, de la réalité que vit la révolution bolivarienne, de sa transition vers le socialisme et de comment tout cela a un impact positif, non seulement au Venezuela mais également dans le reste du continent latino-américain.”


Pour en savoir plus sur le Groupe de la Gauche unitaire européenne : http://www.gue-ngl.org/

L’Equateur en reconstitution

Article publié dans Le Drapeau Rouge, mai 2007

Le 15 avril dernier, 9,2 millions d’Equatoriens (sur une population de 13,5 millions) étaient appelés à se prononcer par référendum sur la proposition d’Assemblée constituante. Si l’on observe des points communs entre l’agenda fixé par le président Rafael Correa et celui suivi à l’époque par le vénézuélien Hugo Chávez, la ressemblance la plus flagrante se trouve du côté de l’opposition. Et une fois de plus, les médias font partie de la stratégie.

Les visages défilaient à l’écran. Sous le soleil, ils étaient réunis devant l’hôpital militaire de Santiago où agonisait Pinochet. En les voyant en décembre dernier pleurer la mort de l’ex-dictateur chilien, tout devenait plus clair dans ma tête. C’était les mêmes ! Les mêmes qui, lors du coup d’Etat fasciste qui secoua le Venezuela le 11 avril 2002, avaient applaudi la prise de pouvoir du patron des patrons, Pedro Carmona. Les mêmes visages, blancs pour la plupart, lunettes de soleil et chemise de marque. La même haine envers tout ce qui est noir, indien, travailleur, socialiste ou communiste. La même admiration du modèle nord-américain. Et ce sont de nouveau les mêmes aujourd’hui en Equateur qui ont mené campagne contre Correa et sa proposition d’Assemblée constituante.

Le président équatorien a dénoncé une intense "propagande millionnaire et mensongère". Dans le pays le plus instable de la région (huit chefs d’Etat se sont succédés dans la dernière décennie), l’oligarchie nationale se permet encore de donner des "conseils" et des mises en garde face au "modèle totalitaire du président Chávez" que voudrait imposer Rafael Correa. Les médias nationaux et internationaux s’empressent de relayer ce message avec une servilité complaisante.

Les trois pays latino-américains à être passés par une Assemblée constituante sont le Venezuela, la Bolivie et aujourd’hui l’Equateur. En se référant aux difficultés qu’affronte actuellement Evo Morales, le président équatorien a assuré qu’il ne répèterait pas les erreurs commises en Bolivie : "Le problème de l’assemblée bolivienne s’est trouvé dans ses statuts. Avec toute la sympathie et tout le respect que j’ai pour Evo Morales, je crois qu’il a commis une erreur fondamentale : essayer de dialoguer, d’établir un consensus avec des gens qui ne veulent rien changer."

La nouvelle constitution

Les 130 représentants élus à l’Assemblée constituante (qui devrait être installée avant la fin de l’année) disposeront des pleins pouvoirs pour rédiger la nouvelle constitution. Laquelle devra à son tour être légitimée par référendum populaire. Parmi les grandes lignes de cette nouvelle carta magna, le président Correa a annoncé la "planification avec participation sociale et le contrôle citoyen contre la corruption." Toute personne élue devra rendre des comptes et tout mandat issu d’élections populaires sera révocable.

Au niveau économique, il promet un "modèle économique solidaire, avec un rôle régulateur de l’Etat afin de combattre la pauvreté". De même que "l’exploitation, l’utilisation soutenable et la propriété sociale des ressources naturelles stratégiques, afin de satisfaire les nécessités actuelles et futures de la population et non le paiement de la dette extérieure". L’Equateur a également l’intention de se joindre à l’initiative, lancée par le Venezuela et l’Argentine, de créer une Banque du Sud. Cet organisme qui devrait voir le jour dès juin 2007, vise à renforcer la souveraineté financière face aux organismes internationaux tels que la Banque Interaméricaine de Développement (BID), la Banque Mondiale et le FMI. Le pays andin a comme autre objectif de relancer sa production pétrolière et de réintégrer l’OPEP. Au niveau de l’intégration latino-américaine, on peut également s’attendre à ce que Quito rejoigne Cuba, la Bolivie, le Nicaragua et le Venezuela au sein de l’ALBA (Alternative Bolivarienne des Amériques).

L’émancipation par l’intégration

De passage à Caracas, Pierina Correa, coordinatrice d’émigration du mouvement Alianza País (le parti du président équatorien), déclarait récemment : "Ce que nous voulons c’est un développement de la région et pas seulement d’un pays. Un développement qui privilégie l’être humain au-delà des intérêts de type politique ou économique. On assiste aujourd’hui au retour des gouvernements aux mains du peuple et la pensée de Bolivar s’étant de plus en plus. Nous travaillons pour appuyer cette lutte qui renforcera la région et permettra de former un bloc solide."

L’émergence et l’émancipation des peuples d’Amérique latine passe inévitablement par cette intégration solidaire prônée actuellement par les gouvernements progressistes. La tâche de Rafael Correa reste immense. Bien que doté d’une nouvelle constitution, le pays continuera de fonctionner dans le cadre des institutions bourgeoises. Et au-delà d’une propagande médiatique féroce tant intérieure qu’extérieure, le peuple équatorien devra affronter une résistance active des secteurs les plus conservateurs et réactionnaires de la société. Car même lorsque la redistribution des richesses essaie de se mener de façon pacifique, les plus nantis n’abandonnent jamais leurs privilèges sans tirer leurs dernières cartouches. Les nostalgiques pleurant la mort de Pinochet en décembre dernier sont là pour nous le rappeler.

vendredi 20 avril 2007

Indétrônable Chávez !

Article publié dans Le Journal du Mardi et dans F.A.L. Magazine, décembre 2006

Photo : Seb

Le 3 décembre dernier, le président vénézuélien Hugo Chávez se soumettait pour la quatrième fois depuis 1998 au suffrage universel. Dans les quartiers populaires, on ne doutait pas un seul instant de la réélection du "candidat de la Révolution bolivarienne". Cependant, les spéculations allaient bon train sur les dispositions de l'opposition à accepter la défaite. En lui accordant 62,89% des voix, la population s'exprimait clairement en faveur du "Comandante" et ne laissait ainsi aucune place aux éventuelles contestations. Réalisant le score le plus élevé depuis son arrivée au pouvoir, le président réélu a obtenu le feu vert pour approfondir son processus révolutionnaire dès 2007.

Arrestation d'un correspondant de TeleSur à Bogotá

COLOMBIE - Article publié sur le site de La Gauche, 01 décembre 2006

Le 19 novembre dernier, Fredy Muñoz, journaliste de la télévision latinoaméricaine TeleSur, était arrêté à l'aéroport de Bogotá, au retour d'un voyage au siège de la chaîne à Caracas. Les autorités colombiennes n'ont apporté aucune preuve tangible pour justifier son arrestation et les graves accusations qui sont portées contre lui. Tout indique à penser qu'il s'agit là d'une tentative de déstabilisation et de criminalisation d'un média qui se présente comme la voix du Sud, l'anti-CNN.


Pour en savoir plus sur TeleSur et voir la programmation en direct : www.telesurtv.net


Construire le pouvoir populaire

Articles parus dans Le Courrier, 29 novembre 2006

Début septembre le président Chávez annonçait les sept lignes stratégiques de son "Projet national Simon Bolivar", un ensemble d’idées destinées à définir le cap de la Révolution bolivarienne à partir de 2007. La démocratie participative était l’une de ces priorités. De même que "l’approfondissement" du processus de transformation économique et sociale. Au point que les huit premières années du proceso apparaîtront comme une transition vers ce que Chávez se plaît à appeler "le socialisme du XXIe siècle". La démocratisation de l’Etat est d’autant plus cruciale que la corruption et la bureaucratie demeurent des fléaux puissamment enracinés. L’instauration, cette année, des Conseils communaux montre la voie choisie : transférer compétences et moyens à la base pour contourner la bureaucratie. Afin de favoriser la participation populaire, le gouvernement mise aussi sur l’amélioration du niveau culturel et éducatif. La semaine dernière, la Mission Alma Mater a été officiellement lancée, elle consistera en la construction de cinquante nouvelles universités et institutions éducatives supérieures.

Autre projet phare : la "sécurité sociale unique et solidaire". "Elle ne sera pas déterminée par la capacité de paiement de ceux qui cotisent, mais bien par sa responsabilité face à la société", décrit Ricardo Dorado. Plus largement, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale affirme que le projet de M.Chávez est de "construire une société dans laquelle les travailleurs jouent un rôle fondamental". L’idée d’un parti unique des travailleurs a d’ailleurs été avancée. Mais le débat devra se mener au sein même des organisations politiques et sociales, estime-t-il.

Soutien critique des paysans



Photo : Seb

"Más poder para el pueblo" - "Plus de pouvoir au peuple"
C'était l'une des revendications des paysans
lors de leur manifestation à Caracas en novembre dernier.


"Il y a eu un effort de la part du gouvernement, c’est indiscutable. Mais en étant objectif su
r ce que l’on veut, sur ce que veut la population, on se rend compte qu’il reste encore beaucoup à faire". C’est par ces mots que José Luis González résume ce que les huit années du gouvernement Chávez lui ont apporté en tant que paysan. Membre de la direction nationale du Front national paysan Ezequiel Zamora, lui et son organisation soutiennent de façon critique la réélection du président. Appui qu’ils ont d’ailleurs manifesté en masse en novembre dernier dans la capitale Caracas. La question de la répartition des terres reste une des faiblesses du gouvernement bolivarien. Malgré une Constitution qui affirme que "le régime latifundiste est contraire à l’intérêt social" et une Loi des terres qui vise à sa redistribution, la résistance des grands propriétaires reste tenace et utilise des moyens parfois extrêmement violents. Tués, blessés ou portés disparus, des paysans continuent d’être victimes des hommes de main ou des entreprises de sécurité au service des latifundistes.

Panama : un canal élargi

Article publié dans Le Journal du Mardi et sur le RISAL, octobre 2006

Photo : Seb

Le référendum du dimanche 22 octobre dernier est venu confirmer ce que les sondages annonçaient depuis plusieurs semaines. Le canal de Panama sera élargi grâce à la construction d'un troisième jeu d'écluses, permettant ainsi le passage de bateaux Post-Panamax et l'augmentation du trafic. Bien plus qu'une simple question de référendum national, cet élargissement aura des répercutions sur le transport maritime au niveau mondial.

Le destin du Panama passe par son canal

Article publié dans Le Journal du Mardi et sur le RISAL, octobre 2006

Photo : Seb

Le 22 octobre prochain, 2 millions de Panaméens se rendront aux urnes afin de décider du futur de leur canal. Présenté en mars dernier, le projet du gouvernement de Martin Torrijos d'élargir la voie interocéanique doit en effet être approuvé par référendum. L'Autorité du Canal de Panama (ACP) projette de construire un troisième jeu d'écluses afin de permettre le passage de bateaux Post-Panamax et de garantir la compétitivité du canal face à l'augmentation de la demande mondiale.

Hilda Presman : "La dictature a imposé, à feu et à sang, le modèle néolibéral"

ARGENTINE - Article publié dans La Gauche et sur le RISAL, mai 2006

Hilda Presman est une militante dévouée à la cause des droits de l’Homme dans sa province natale de Corrientes, sur le littoral du Nord-Est argentin. Trop modeste pour parler d’elle-même, elle qui n’a été arrêtée "que pendant une quarantaine de jours, peu après le coup d’Etat" (1976), elle était récemment en Belgique pour raconter son pays. A l’occasion de la commémoration des 30 ans de l’instauration de la dictature, elle a rencontré des compatriotes exilés chez nous durant la période de répression. Les blessures du passé, les luttes du présent et les espoirs du futur, c’est un peu tout cela que nous a raconté Hilda...

Dans les usines récupérées du Venezuela

Article publié dans La Gauche (mars 2006) et sur le RISAL (avril 2006)


Photo : Seb

"C’en est fini de la division sociale du travail, nous sommes tous égaux maintenant !" Casque vissé sur la tête, lunettes de sécurité flanquées sur le nez souligné par une moustache grisonnante, Francisco Piñero est l’un des 60 employés d’Inveval, une entreprise récupérée récemment par les travailleurs organisés en coopérative. A Los Teques, à une heure de route de Caracas, c’est avec une fierté sans pareil que Francisco et ses camarades nous ont fait découvrir leur usine. Visite guidée...

Vers une révolution technologique

Article publié dans La Gauche (mars 2006 et) sur le RISAL (avril 2006)

L’un des sujets abordés durant le Forum social mondial à Caracas en janvier 2006 était le droit à la communication. Dans ce domaine le contexte vénézuélien constitue, au niveau mondial, un véritable laboratoire pour l’analyse des processus de communication massive. Après avoir tiré les leçons du coup d’Etat du 11 avril 2002, le gouvernement bolivarien essaie peu à peu de garantir son indépendance technologique.



Creative Commons License

Les visuels et textes publiés sur ce blog sont sous
licence creative commons

Si vous souhaitez utiliser l'un de ces éléments, merci de me contacter